jeudi 28 mai 2009

Particularités de la commune de Loverdo

Particularités de la commune de Loverdo (ou Hassen ben-Ali) ou (Ouzera)

Ce village a trois noms

En 1874 lorsqu'il fut créé on l'appela Hassen ben-Ali, nom de la tribu locale à laquelle on avait acheté les terrains nécessaires à l'implantation des colons ; pour 42 000 francs et quelques compensations. Il se serait agi d'une transaction de gré à gré passée avec deux des douars de la tribu ; ceux situés près de la route de Médéa à Djelfa. C'est tout à fait possible, même s'il est difficile de se persuader qu'aucune pression des autorités n'ait facilité la vente. Il peut se faire aussi que le prix ait été supérieur à celui du marché, et donc bien tentant.

En 1877 le village est rebaptisé Loverdo pour rendre hommage à un général de division. Comme il y eut dans l'armée française en Algérie deux officiers supérieurs portant ce nom, Nicolas et son fils Alexandre, il faut préciser que c'est Nicolas qui est concerné car c'est lui qui a participé au débarquement de Sidi-Ferruch le 14 juin 1830 et à la conquête d'Alger à la tête de la 2è des 3 divisions de l'expédition. La 1ère commandée par Berthezène et la 3è par le duc d'Escars plus tard appelé duc des Cars (mais pas des autobus).
Nicolas est né en 1773 à Kephattinia (Céphalonie) la plus grande des îles Ioniennes qui est alors vénitienne. Il porte un nom et des prénoms grecs francisés en Nicolas Michel. Mais en 1797 l'archipel est conquis par les armées du Directoire et devient français pour peu de temps. Nicolas qui a 24 ans peut s'engager dans l'armée française. Il devint l'un des innombrables soldats d'origine étrangère de la Grande Armée de Napoléon. Comme durant les Cent-Jours il eut le bon réflexe de rester fidèle à Louis XVIII, sa carrière se poursuivit jusqu'au grade de général de division. C'est avec ce grade qu'il fut responsable de la protection du camp de Sidi-Ferruch du 14 au 28 juin 1830 ; et participa à la marche sur Alger à partir du 29 juin. Avec deux de ses trois brigades il constitua l'aile droite de l'armée de de Bourmont qui s'en allait assiéger Alger.
Loverdo est donc l'un des généraux de la conquête. Je ne sais pas s'il a eu des liens particuliers avec le Titteri. A priori non puisqu'il est mort avant la prise de Médéa.

En 1962 Loverdo devient Ouzera toponyme dont j'ignore l'origine.

Le terroir de Loverdo touchant celui de Damiette (1848) qui touche celui de Médéa qui touche celui de Lodi (1848), c'est une zone de terres colonisées et viticoles continue qui s'étend sur plus de 12km, de Lodi à Loverdo. Loverdo n'est pas un village isolé comme souvent dans le bled.
D'abord rattaché à la commune de Médéa, il est en 1877 intégré à la commune mixte de Berrouaghia.
Comme leurs voisins, les colons de Loverdo sont devenus des viticulteurs dans les années 1880, produisant, dit le guide bleu, d'excellents vins rouges.

L'aspect du village n'est pas du tout conforme au schéma classique du plan carré en damier. C'est un village rue traversé par la RN 1 et longée par la voie ferrée. Il est bâti à flanc de coteau.
Il était, depuis 1892 desservi par la voie ferrée de Blida à Djelfa. Et il fut toujours desservi par des transports routiers, diligences, puis autobus. Tous les autocars blidéens allant vers le sud y faisaient un arrêt au passage.

Particularités de la commune de Champlain (ou El Omaria)

Quel rapport Champlain eut-il avec l'Algérie en général et le Titteri en particulier ? Aucun bien sûr. Ceux qui ont choisi ce nom pour un nouveau village ont pensé au fondateur de la " Nouvelle-France " (pour l'Algérie on disait plutôt " l'Autre France "). Ils ont oublié le triste destin des 15 000 Acadiens (Français de l'est du Canada) déportés par le " Grand dérangement " de 1755-1760 au cours des guerres franco-anglaises, et l'abandon définitif de tout le Canada français le 10 février 1763 au premier traité de Paris. Fâcheux précédent quand on connaît l'issue.

La date de sa création, par contre, n'est pas claire du tout. La date de 1921 parfois avancée avec force détails est une erreur manifeste. Le village apparaît dans le dictionnaire Joanne de 1908 avec la mention " village de la commune mixte de Berrouaghia ". Il apparaît aussi dans une liste de quatre villages publiée en 1904 et consultable sur le site des archives de Rennes ; il s'y trouve non seulement le nom, mais aussi la distance à Médéa, l'altitude, le nombre (30) et la taille des concessions (35ha)ainsi que les cultures et les élevages pratiqués.
Créé avant 1904 il a bénéficié du décret de 1878 qui avait maintenu le système des concessions gratuites (mais sous condition d'un apport en capital après 1892) avec un maximum de 40ha : avec 35ha, on n'en était pas loin. Ce village a donc été créé entre 1878 et 1904 : je ne puis préciser davantage ; mais j'imagine plus près de 1904 que de 1878. Alors 1921 ? Peut-être la date d'un agrandissement comme il est arrivé assez souvent.

Le cadre naturel est un peu différent de celui des trois autres villages de la commune mixte. Le terroir se trouve, pour l'essentiel, ainsi que le village, dans une petite plaine de montagne, et non sur une crête. Cette cuvette est à 800m d'altitude à peine, et est dominée au nord, par des massifs de l'Atlas tellien où la France n'a installé ni villages, ni routes, ni pistes carrossables. Il n'y avait en 1935, vers le nord, que l'amorce de la piste tracée, après l'indépendance, jusqu'au col des deux-bassins au-dessus de Tablat. Cette cuvette à fond plat appartient au bassin de l'oued Isser.

Les cultures principales étaient céréalières, mais avec un vignoble d'appoint pour des vins de qualité VDQS, même si le nom de Champlain évoque spontanément les arpents de neige du Canada plutôt qu'un cru de Médéa. L'élevage bovin était possible.

Champlain se trouve sur une route secondaire qui double la RN 18. Pour y aller, il fallait le faire exprès. C'est peut-être pour cette raison que je n'ai trouvé aucune photo, ni dans les livres d'images, ni sur Internet, ni dans mes albums de famille. Je n'y suis jamais allé. Dommage.

Le village n'est pas traversé par la départementale 23, il est longé par elle. Le rectangle allongé des lots à bâtir est au sud. Les autobus ne traversaient pas davantage le village : ils y avaient leur terminus. Ils venaient de Berrouaghia : en 1948 il y avait un aller-retour quotidien. La route de Berrouaghia passait tout près du camp militaire Paulinier, antérieur à la fondation du village et au sud duquel fut trouvé en 1906 un gisement préhistorique mésolithique tardenoisien. Elle passait ensuite à Ouled-Brahim. Berrouaghia est à 29km de Champlain.

Le 4 avril 1948 il se produisit à Champlain un événement plus que fâcheux, mais qui ne prit toute sa signification qu'avec le recul du temps. C'était jour d'élections : celle du premier tour pour la désignation des députés à l'assemblée algérienne. Il y eut une émeute avec attaque d'un poste de contrôle qui fit trois morts.

Particularités du village de Nelsonbourg (ou Aïn-Tsarès) (ou Si-Mahdjoub)

Je ne puis commenter que le toponyme Nelsonbourg dont la terminaison en bourg est inhabituelle pour un village d'agriculteurs. Evidemment Nelsonbourg ne doit pas son nom à un amiral anglais. C'est la première partie du nom d'un algérois, né en 1847et qui fit une belle carrière dans l'administration et dans la banque. En 1907 il avait 60 ans : il était préfet honoraire (il avait été préfet du département d'Alger) et ancien directeur général de la banque d'Algérie. Il était à la retraite, mais avait conservé le goût d'entreprendre.

Son nom complet est Félix Nelson-Chierico. Il n'est pas impossible qu'il ait participé au projet de création du village, ne serait-ce qu'en y achetant une concession. Auquel cas il ne s'y serait pas intéressé longtemps car en 1915 (on l'a déjà vu avec Sidi-Aïssa) il entreprend la mise en exploitation du gisement de pétrole de l'oued Guétérini.

Toujours est-il, que pour nommer le nouveau village, Nelsonbourg sonnait mieux aux oreilles française de l'époque que Nelson-Chierico. Mais pourquoi tenait-on tant à associer ce nom au village ? Je l'ignore.

En 1907 commencent des travaux de voirie vers la colline d'Aïn-Tsarès.

En 1910 est signé le décret de création du nouveau centre de colonisation.

En 1911 arrivent les colons :15 familles dont 13 d' " immigrants ". Ce village étant apparu postérieurement au décret 13 septembre 1904, ces colons ont dû acheter leur concession. Les lots étaient vastes : 70 ha. Ils avaient donc les moyens de mettre en valeur leurs terres, c'est-à-dire à cette date de planter des vignes.

En 1922 le village, qui dépendait de Médéa, est rattaché à la commune mixte de Berrouaghia.

En 1947 il est promu chef-lieu de CPE

En 1952 une nouvelle mairie est inaugurée le même jour que celle de Loverdo, le 4 novembre, par une pléiade de personnalités politiques et religieuses. Les politiques sont notamment le Président de l'Assemblée (Laquière), le Président du Conseil général (Farès déjà rencontré à Berrouraghia, le Préfet d'Alger (Trémaud) et les maires de treize communes du Titteri ; le maire venu de plus loin étant celui de Letourneux.

Les trois religions monothéistes étaient également représentées.

A peu près 80 européens devaient, à cette date, vivre dans la commune : une douzaine de familles de colons propriétaires, trois gérants, un hôtelier-cafetier et des fonctionnaires.

Le cadre naturel est franchement montagneux, entre 800 et 1000m d'altitude. Le climat y est très favorable à la vigne. Les vins y étaient de qualité supérieure.

Le relief, ainsi qu'on le voit sur le petit extrait de la carte au 1/50 000, est marqué par l'encaissement profond de 300m de l'oued qui se jette au sud dans la vallée de l'oued Sahari, tributaire du Chélif.

Le village a été construit sur un dos de terrain dominant cette vallée. Il a l'aspect d'un village-rue, tout en longueur comme son voisin Ben-Chicao situé à 18 km plus à l'est. Soyons sincère, le village avait deux rues paralléles à la route, avec de belles maisons à étage qui s'expliquent, et par la date tardive de la fondation du centre, et par le mode d'attribution des lots qui avait sélectionné des familles aisées, et par la taille des lots. Cette image est celle d'un village qui paraît prospère. Les arbres y sont nombreux derrière les maisons. La végétation naturelle était forestière.

Un seul service d'autocar reliait une fois par jour, dans chaque sens, le village à la gare dite de Ben-Chicao, mais qui est assez loin du village du même nom. Il n'y avait aucun service direct vers Médéa à 28 km ou vers Berrouaghia à 18 km.

dimanche 10 mai 2009

berrouaghia


Berrouaghia avant les Français
Sur Berrouaghia avant les Romains je ne sais rien. Et je n'en dirai pas davantage.
Sur Berrouaghia sous les Romains je ne sais pas grand-chose, mais je dirai tout.

Il est certain qu'une voie romaine fut tracée entre Caesarea, capitale de la Maurétanie césarienne et la villa d'Auzia dès le premier siècle après Jésus-Christ. Cette voie qui était l'axe majeur de déplacement des légions entre l'est et l'ouest, passait par Auzia (Aumale), Rapidum (Masqueray) et le futur Berrouaghia.

Il est vraisemblable qu'une petite cité romaine ait été établie en ce lieu puisqu'on a trouvé dans le village français quelques grosses pierres bien taillées et gravées. Cette cité était modeste car on n'aperçoit à Berrouaghia aucune ruine grandiose : ni thermes, ni théâtre, ni temple, ni forum… Il est seulement probable que le nom de cette cité ait été Tirinadi.

Il est tout à fait certain que les Romains ont installé au IIè siècle, sans doute sous Hadrien (117-133), un camp militaire auquel fut associée une colonie de vétérans. Ce camp était situé un peu à l'est du Berrouaghia actuel : son nom était Thanaramusa castra. Tirinadi et Thanaramusa sont donc deux centres proches, mais distincts.

Sur les vicissitudes de ces deux centres à partir des troubles du IVè siècle, je ne sais rien. Il est probable que le site fut pillé et abandonné à cause de l'insécurité due aux révoltes des Donatistes ou des circoncellions. Les Vandales sont sûrement passés par là en suivant la voie romaine qui les conduisit en 10 ans (429-439) de Gibraltar à Carthage. Je doute que les Byzantins y soient venus.

A l'époque des invasions hilaliennes ils avaient disparu. Les annales permettent d'affirmer que la région a été intégrée aux royaumes ziride jusqu'en 1014, puis hammadide jusqu'à sa conquête par les Almoravides vers 1080. Mais aucun nom correspondant à Berrouaghia n'y figure. Ensuite la région vit passer tous les conquérants venus de l'est ou, surtout, de l'ouest.

Berrouaghia refait surface après la conquête ottomane. En 1548 le site est intégré au nouveau beylik du Titteri. Le bey réside à Médéa à une trentaine de kilomètres à peine de Berrouaghia où vivent des tribus classées par les Turcs dans le Makhzen supérieur et chargées de surveiller les tribus raïas soumises à tous les impôts. Ces tribus sont dévouées à proportion des privilèges obtenus et de la crainte des troupes régulières. Les Turcs ont aussi créé une smala de soldats indigènes " professionnels " payés par l'octroi de terres à l'endroit où la France créa un pénitencier agricole. Le bey y avait aussi un vaste domaine avec terres azel (cultures) et azib (pâtures) pour les bivouacs des troupes en campagne, placé sous la responsabilité d'un ou plusieurs caïds.

vendredi 8 mai 2009

lodi (ou Draa Esmar)


lodi (ou Draa Esmar) et
Damiette (ou Aïn Dhab)

Durant les deux premières années de sa courte existence la Seconde République a créé 54 villages de colonisation dans les trois provinces, dans des circonstances il est vrai exceptionnelles. Lodi et Damiette appartiennent au premier ensemble de 42 villages dits " colonies agricoles de 1848 ".

Ces créations de villages décidées dans l'urgence pour de mauvaises raisons avec des colons mal choisis ont été largement improvisées. Les premiers colons y ont connu des débuts très difficiles.

Lodi et Damiette ont été inaugurés le même jour, 2 décembre 1848, par des colons acheminés depuis Paris-Bercy par le même 8è convoi (sur 17 au total) parti le 5 novembre, arrivé à Marseille le 21 et à Alger le 29. Ces colons ont dû remonter la route toute neuve des gorges de La Chiffa et traverser Médéa avant de se séparer, les uns vers l'ouest pour Lodi (4 km) les autres vers l'est pour Damiette (3 km).

Avant d'envisager d'exposer les particularités de ces deux villages quasi jumeaux il n'est sans doute pas inutile d'expliquer ce que furent ces colonies de 1848, pourquoi elles ont été décidées à Paris et comment elles ont été réalisées en Algérie.

Généralités sur les colonies agricoles de 1848

Une origine accidentelle. Durant l'hiver 1848 il y eut beaucoup de misère et de chômeurs, non indemnisés en ce temps-là, à Paris. Le Gouvernement Provisoire né de la révolution de février 1848 crut trouver une solution en finançant l'ouverture de chantiers publics. Comme ils étaient financés par le budget de l'Etat, on les appela " Ateliers Nationaux ".

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26 février. Décret de création des Ateliers Nationaux (à Paris seulement). Le ministre des Travaux Publics, Trélat, est chargé de la mise en application. Il ouvrit aussitôt des registres d'inscription des volontaires dans les mairies des 12 arrondissements du Paris d'alors.

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17 mai. Arrêt des inscriptions. Il y en avait trop ; et les impôts directs, augmentés de 45%, rentraient fort mal. Toutes les régions payaient ces impôts ; seuls les Parisiens pouvaient en profiter. De surcroît on ne savait pas à quoi d'utile employer tous ces ouvriers.

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23 juin. Annonce de la suppression des Ateliers Nationaux et du salaire de 2fr par jour. La fermeture effective eut lieu le 3 juillet après la répression des émeutes de juin.

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23-26 juin. Emeutes à Paris, réprimées par le Ministre de la guerre Cavaignac. A l'Assemblée Législative un projet de deux députés, Leroux de Paris et Barrot d'Alger, refait surface. Ils avaient trouvé une solution susceptible de résoudre la question sociale à Paris et de relancer la colonisation en Algérie : éloigner de Paris quelques milliers d'ouvriers en leur proposant des terres en Algérie.

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19 septembre. Arrêté de création de 42villages en Algérie.

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23 septembre. Ouverture des registres d'inscription des volontaires. Il y eut 12 000 places, puis finalement 13 903. Le nouveau Ministre de la guerre, Lamoricière, décida de confier l'organisation des transports et l'installation des villages, à l'armée.

rapidum(ou sour djouab)

A proximité se trouvaient les ruines romaines de Rapidum (ou Sour Djouab)

Seuls les archéologues patentés peuvent imaginer, en regardant ce champ de pierres dressées, l'allure qu'avait cette toute petite ville de vétérans de la province de Maurétanie Césarienne. La colonie de vétérans avait succédé à un Castra Rapida qui avait été créé en 122 sous Hadrien pour une cohorte de 600 soldats, peut-être venus de Sardaigne à l'origine, et abandonné moins d'un siècle plus tard, la sécurité de cette voie reliant Tirinadi (Berrouaghia) à Auzia (Aumale) paraissant assurée.

Le site fut fouillé en 1912 et surtout en 1927 par Albertini, puis en 1951 par mon professeur d'histoire à Bugeaud, Marcel Leglay ; jamais par Masqueray.

Si vous avez remarqué sur la carte Michelin deux fois le symbole signalant des ruines proches appelées Rapidi et Sour Djouab, c'est une erreur. Rapidum, Rapidi ou Sour Djouab sont les trois noms utilisés pour désigner le même champ de ruines. Contrairement à Timgad, Djemila ou Tipaza, Rapidum ne devint jamais un lieu touristique et il n'y eut pas d'hôtel à Masqueray ; juste un café.

Stéphane Gsell (ou Hakimia)

Ce village sera le village sinistré de mon travail, car autant il est facile de trouver des informations sur la personne de Stéphane Gsell, autant il est difficile d'en trouver sur le village : le guide Michelin l'ignore et le guide bleu paraît le confondre avec Souagui qui n'est pas un centre de colonisation. Heureusement qu'il est mentionné par toutes les cartes ; sinon on pourrait douter de son existence.

Son nom a pour origine le patronyme d'un archéologue passionné par l'étude des ruines romaines, de toutes tailles, éparses dans toute l'Algérie.

Stéphane Gsell
est né à Paris en 1864 dans une famille alliée à celle de Louis Pasteur. Il fut un brillant élève qui intégra l'Ecole Normale Supérieure de la rue d'Ulm et en sortit agrégé d'histoire tout comme Masqueray. Il fut ensuite nommé à Rome.

Il arriva à Alger en 1890, non comme professeur de lycée, mais comme professeur à l'Ecole supérieure des Lettres que Masqueray avait créée à Alger en 1880. Pendant 4 ans Masqueray fut donc le chef de Stéphane Gsell.

Le jeune professeur dépassa son directeur d'Alger car il finit sa carrière à Paris avec une double casquette associant deux postes prestigieux : Inspecteur des Antiquités et Musées d'Algérie,
Professeur au Collège de France.

Au Collège de France on avait créé pour lui la chaire d'Histoire de l'Afrique du Nord.

Il ne resta donc pas à Alger jusqu'à l'âge de la retraite. Mais il y revint tous les ans en mission de fouilles qu'il conduisit de façon scientifique, s'efforçant de faire le tour de tous les sites et de déchiffrer les inscriptions trouvées sur les monuments ou sur de simples pierres gravées ; à commencer par les bornes milliaires comme celle donnant la distance de Rapidum à Auzia.

Entre 1893 et 1928 il a publié de nombreux livres sur l'Algérie dans l'Antiquité. Ses deux ouvrages majeurs sont : en 1911 un Atlas archéologique de l'Algérie,
de 1913 à 1928 une Histoire ancienne de l'Afrique du Nord en huit volumes.

Il fut le principal archéologue de l'Algérie. L'Algérie a récompensé ce travail de toute une vie en donnant son nom à - un musée à Alger ( Antiquités romaines et Art musulman)
- un lycée à Oran
- un village de colonisation dans le Titteri
- un pénitencier agricole !

Le pénitencier était à 2 km de Berrouaghia sur la route du futur village de Stéphane Gsell. Je connais la date de création du pénitencier (1879), absolument pas la date de fondation du village. Il est sûr qu'il a été créé entre 1908 et 1927. C'est vague : si un lecteur a des précisions à apporter, B.Venis et moi sommes preneurs. Je pense que la date de 1933 trouvée parfois est celle du choix d'un nouveau nom pour un centre plus ancien, Stéphane Gsell étant décédé à Paris en 1932. Ca ne peut pas être celle de la naissance du village.

Le village a été établi sur la route d'Aumale à Berrouaghia à 15km de Masqueray à un carrefour avec une route très secondaire reliant la départementale 20 et la RN 18 distantes de 9km. Il est à 3km à l'est du village indigène de Souagui. Il est dans la même situation que Masqueray, une plaine de montagne à plus de 850m d'altitude et encadrée par des alignements de collines boisées culminant à 1103m au sud. C'est une région de céréales et d'élevage bovin.
L'impossibilité de trouver des renseignements sur le devenir de ce centre de colonisation fait supposer qu'il n'a pas dû être plus brillant que celui de son

vendredi 1 mai 2009

Médéa est une ville de fonctionnaires et assimilés

Il y avait ceux de la sous-préfecture à partir de 1859, puis de la préfecture fin 1956
Il y avait ceux de la justice avec juges, huissiers
Il y avait ceux de la sécurité ; policiers civils et gendarmes au statut militaire
Il y avait ceux des recettes des contributions et des domaines
Il y avait ceux de la trésorerie générale
Il y avait ceux des PTT
Il y avait ceux de l'hôpital
Si l'on ajoute quelques métiers non fonctionnaires mais tout de même très officiels et très contrôlés, comme les notaires, les clercs, les avoués et les banquiers, cela fait beaucoup de monde.

Sans oublier bien sûr les nombreux enseignants du primaire et du secondaire des écoles françaises et indigènes qui furent distinctes jusqu'à la " fusion " de leurs instituteurs en 1949. Comme j'en ai connu quatre, j'en profite pour apporter quelques informations valables pour les années 1940/1950.
J'ai habité l'école des garçons indigènes, j'ai été élève à l'école française, j'ai passé l'examen de sixième au collège et mes parents étaient amis avec la Directrice de l'école de filles indigènes.

Médéa par des services de transports publics


Médéa est à 91km d'Alger.

En 1840 il n'existait aucune route carrossable. La première route, construite en 1842/1843 sous la conduite des officiers du Génie, commence par remonter les gorges de la Chiffa. Je suppose qu'elle a été aussitôt parcourue par des pataches et autres corricolos à large coffre. Ces véhicules lents à traction animale ont été doublés, à partir de 1892 par les trains d'une ligne de chemin de fer qualifiée de pénétrante, bien qu'elle ne pénétrât pas très loin. La route et le rail n'avaient en commun que le tronçon remontant les gorges de la Chiffa jusqu'à son confluent avec l'oued Mouzaïa.

Le chemin de fer est l'amorce d'une ligne inscrite dans le programme de 1879 pour aller jusqu'à Laghouat, au Sahara, mais qui ne fut jamais terminée. Il s'agit d'une ligne à voie étroite (de 1,055m) qui part de la gare de Blida, sur la voie normale Alger-Oran. Elle fut construite à l'économie avec des rampes de 25mm, des courbes de 120 m de rayon et des rails légers de 25kg/m. Le relief, très difficile, explique ces choix techniques ainsi que le grand nombre de tunnels, surtout dans les gorges de la Chiffa ; mais pas seulement. Après la vallée de la Chiffa, le rail remonte, sur 7km, la vallée de l'oued Mouzaïa, avant de tourner sur sa gauche pour grimper jusqu'à Lodi. La gare de Médéa est à 927m d'altitude. On qualifie parfois ce tronçon sinueux et difficile de " ligne alpine " avec un brin d'exagération car aucune tunnel ne dépasse les 1000m de long.

La compagnie de l'Ouest-Algérien, à laquelle la loi du 31 juillet 1886 avait confié la construction du tronçon Blida-Berrouaghia (83km), remplit ses engagements, mais n'alla pas plus loi, car il s'avéra, dès le début, que le trafic resterait faible. et que l'exploitation en serait lourdement déficitaire. Elle utilisa 9 locomotives à vapeur construites à Belfort, qui ne furent remplacées qu'à partir de 1910, quand la voie dépassa Berrouaghia.

Peut-être qu'en 1892 le train était moins lent qu'une patache pour aller à Alger malgré la nécessité de changer de train à Blida. Après 1920 l'autobus, direct, fut plus commode et plus rapide.

Les autobus que j'ai connus appartenaient à la société des auto-cars blidéens la bien nommée car son dépôt principal était à Blida, à gauche en sortant de la ville vers Alger. Auparavant il y aurait eu des services des sociétés Delaunay et Boukamel ; mais je ne sais rien de précis. Dès les années 1930 et jusqu'en 1962 le transporteur fut assurément la société de Blida qui fut nationalisée après l'indépendance. Elle assurait les liaisons Alger-Djelfa et Alger-Tiaret.

Pendant la guerre elle avait équipé ses véhicules de gazogènes ; après 1945 elle acheta aux établissement Chausson d'Argenteuil des véhicules modernes qu'elle fit peindre en rouge. Il y avait d'Alger à Médéa, au moins deux services quotidiens ayant leur terminus dans cette ville. Mais beaucoup d'autres bus de la même compagnie y faisaient un arrêt malgré l'obligation de prévoir un léger détour : ceux qui avaient leur terminus à Berrouaghia, ou Boghari, ou Aïn-Boucif ou Djelfa.

On pouvait aussi apercevoir en ville, près du garage Berliet de la rue Charpenay, les petits véhicules Renault de la SATT (société algérienne des transports tropicaux) qui traversaient tout le Sahara jusqu'au Niger, au Tchad et même au Nigeria anglais. Je doute que des Lemdani aient choisi cette ligne qui n'avait que deux arrêts obligatoires, Boghari pour le déjeuner et Laghouat pour le coucher.

Les cars empruntaient la route des gorges de la Chiffa, parallèlement à la voie ferrée, jusqu'au confluent de l'oued Mouzaïa. Ensuite la route et le rail se séparaient. La route suivait alors, sur 4km, la vallée de l'oued Si Ali, puis au prix de deux lacets très serrés, montait jusqu'au col, à peine visible qui, à 998m, permettait de redescendre vers Médéa.

J'ai été surpris de ne trouver aucune trace de lignes d'autocars vers les villages des environs ou vers Affrevlle. Donc, apparemment, pas de lignes de bus en correspondance avec les train