Particularités de la commune de Loverdo (ou Hassen ben-Ali) ou (Ouzera)
Ce village a trois noms
En 1874 lorsqu'il fut créé on l'appela Hassen ben-Ali, nom de la tribu locale à laquelle on avait acheté les terrains nécessaires à l'implantation des colons ; pour 42 000 francs et quelques compensations. Il se serait agi d'une transaction de gré à gré passée avec deux des douars de la tribu ; ceux situés près de la route de Médéa à Djelfa. C'est tout à fait possible, même s'il est difficile de se persuader qu'aucune pression des autorités n'ait facilité la vente. Il peut se faire aussi que le prix ait été supérieur à celui du marché, et donc bien tentant.
En 1877 le village est rebaptisé Loverdo pour rendre hommage à un général de division. Comme il y eut dans l'armée française en Algérie deux officiers supérieurs portant ce nom, Nicolas et son fils Alexandre, il faut préciser que c'est Nicolas qui est concerné car c'est lui qui a participé au débarquement de Sidi-Ferruch le 14 juin 1830 et à la conquête d'Alger à la tête de la 2è des 3 divisions de l'expédition. La 1ère commandée par Berthezène et la 3è par le duc d'Escars plus tard appelé duc des Cars (mais pas des autobus).
Nicolas est né en 1773 à Kephattinia (Céphalonie) la plus grande des îles Ioniennes qui est alors vénitienne. Il porte un nom et des prénoms grecs francisés en Nicolas Michel. Mais en 1797 l'archipel est conquis par les armées du Directoire et devient français pour peu de temps. Nicolas qui a 24 ans peut s'engager dans l'armée française. Il devint l'un des innombrables soldats d'origine étrangère de la Grande Armée de Napoléon. Comme durant les Cent-Jours il eut le bon réflexe de rester fidèle à Louis XVIII, sa carrière se poursuivit jusqu'au grade de général de division. C'est avec ce grade qu'il fut responsable de la protection du camp de Sidi-Ferruch du 14 au 28 juin 1830 ; et participa à la marche sur Alger à partir du 29 juin. Avec deux de ses trois brigades il constitua l'aile droite de l'armée de de Bourmont qui s'en allait assiéger Alger.
Loverdo est donc l'un des généraux de la conquête. Je ne sais pas s'il a eu des liens particuliers avec le Titteri. A priori non puisqu'il est mort avant la prise de Médéa.
En 1962 Loverdo devient Ouzera toponyme dont j'ignore l'origine.
Le terroir de Loverdo touchant celui de Damiette (1848) qui touche celui de Médéa qui touche celui de Lodi (1848), c'est une zone de terres colonisées et viticoles continue qui s'étend sur plus de 12km, de Lodi à Loverdo. Loverdo n'est pas un village isolé comme souvent dans le bled.
D'abord rattaché à la commune de Médéa, il est en 1877 intégré à la commune mixte de Berrouaghia.
Comme leurs voisins, les colons de Loverdo sont devenus des viticulteurs dans les années 1880, produisant, dit le guide bleu, d'excellents vins rouges.
L'aspect du village n'est pas du tout conforme au schéma classique du plan carré en damier. C'est un village rue traversé par la RN 1 et longée par la voie ferrée. Il est bâti à flanc de coteau.
Il était, depuis 1892 desservi par la voie ferrée de Blida à Djelfa. Et il fut toujours desservi par des transports routiers, diligences, puis autobus. Tous les autocars blidéens allant vers le sud y faisaient un arrêt au passage.
Particularités de la commune de Champlain (ou El Omaria)
Quel rapport Champlain eut-il avec l'Algérie en général et le Titteri en particulier ? Aucun bien sûr. Ceux qui ont choisi ce nom pour un nouveau village ont pensé au fondateur de la " Nouvelle-France " (pour l'Algérie on disait plutôt " l'Autre France "). Ils ont oublié le triste destin des 15 000 Acadiens (Français de l'est du Canada) déportés par le " Grand dérangement " de 1755-1760 au cours des guerres franco-anglaises, et l'abandon définitif de tout le Canada français le 10 février 1763 au premier traité de Paris. Fâcheux précédent quand on connaît l'issue.
La date de sa création, par contre, n'est pas claire du tout. La date de 1921 parfois avancée avec force détails est une erreur manifeste. Le village apparaît dans le dictionnaire Joanne de 1908 avec la mention " village de la commune mixte de Berrouaghia ". Il apparaît aussi dans une liste de quatre villages publiée en 1904 et consultable sur le site des archives de Rennes ; il s'y trouve non seulement le nom, mais aussi la distance à Médéa, l'altitude, le nombre (30) et la taille des concessions (35ha)ainsi que les cultures et les élevages pratiqués.
Créé avant 1904 il a bénéficié du décret de 1878 qui avait maintenu le système des concessions gratuites (mais sous condition d'un apport en capital après 1892) avec un maximum de 40ha : avec 35ha, on n'en était pas loin. Ce village a donc été créé entre 1878 et 1904 : je ne puis préciser davantage ; mais j'imagine plus près de 1904 que de 1878. Alors 1921 ? Peut-être la date d'un agrandissement comme il est arrivé assez souvent.
Le cadre naturel est un peu différent de celui des trois autres villages de la commune mixte. Le terroir se trouve, pour l'essentiel, ainsi que le village, dans une petite plaine de montagne, et non sur une crête. Cette cuvette est à 800m d'altitude à peine, et est dominée au nord, par des massifs de l'Atlas tellien où la France n'a installé ni villages, ni routes, ni pistes carrossables. Il n'y avait en 1935, vers le nord, que l'amorce de la piste tracée, après l'indépendance, jusqu'au col des deux-bassins au-dessus de Tablat. Cette cuvette à fond plat appartient au bassin de l'oued Isser.
Les cultures principales étaient céréalières, mais avec un vignoble d'appoint pour des vins de qualité VDQS, même si le nom de Champlain évoque spontanément les arpents de neige du Canada plutôt qu'un cru de Médéa. L'élevage bovin était possible.
Champlain se trouve sur une route secondaire qui double la RN 18. Pour y aller, il fallait le faire exprès. C'est peut-être pour cette raison que je n'ai trouvé aucune photo, ni dans les livres d'images, ni sur Internet, ni dans mes albums de famille. Je n'y suis jamais allé. Dommage.
Le village n'est pas traversé par la départementale 23, il est longé par elle. Le rectangle allongé des lots à bâtir est au sud. Les autobus ne traversaient pas davantage le village : ils y avaient leur terminus. Ils venaient de Berrouaghia : en 1948 il y avait un aller-retour quotidien. La route de Berrouaghia passait tout près du camp militaire Paulinier, antérieur à la fondation du village et au sud duquel fut trouvé en 1906 un gisement préhistorique mésolithique tardenoisien. Elle passait ensuite à Ouled-Brahim. Berrouaghia est à 29km de Champlain.
Le 4 avril 1948 il se produisit à Champlain un événement plus que fâcheux, mais qui ne prit toute sa signification qu'avec le recul du temps. C'était jour d'élections : celle du premier tour pour la désignation des députés à l'assemblée algérienne. Il y eut une émeute avec attaque d'un poste de contrôle qui fit trois morts.
Particularités du village de Nelsonbourg (ou Aïn-Tsarès) (ou Si-Mahdjoub)
Je ne puis commenter que le toponyme Nelsonbourg dont la terminaison en bourg est inhabituelle pour un village d'agriculteurs. Evidemment Nelsonbourg ne doit pas son nom à un amiral anglais. C'est la première partie du nom d'un algérois, né en 1847et qui fit une belle carrière dans l'administration et dans la banque. En 1907 il avait 60 ans : il était préfet honoraire (il avait été préfet du département d'Alger) et ancien directeur général de la banque d'Algérie. Il était à la retraite, mais avait conservé le goût d'entreprendre.
Son nom complet est Félix Nelson-Chierico. Il n'est pas impossible qu'il ait participé au projet de création du village, ne serait-ce qu'en y achetant une concession. Auquel cas il ne s'y serait pas intéressé longtemps car en 1915 (on l'a déjà vu avec Sidi-Aïssa) il entreprend la mise en exploitation du gisement de pétrole de l'oued Guétérini.
Toujours est-il, que pour nommer le nouveau village, Nelsonbourg sonnait mieux aux oreilles française de l'époque que Nelson-Chierico. Mais pourquoi tenait-on tant à associer ce nom au village ? Je l'ignore.
En 1907 commencent des travaux de voirie vers la colline d'Aïn-Tsarès.
En 1910 est signé le décret de création du nouveau centre de colonisation.
En 1911 arrivent les colons :15 familles dont 13 d' " immigrants ". Ce village étant apparu postérieurement au décret 13 septembre 1904, ces colons ont dû acheter leur concession. Les lots étaient vastes : 70 ha. Ils avaient donc les moyens de mettre en valeur leurs terres, c'est-à-dire à cette date de planter des vignes.
En 1922 le village, qui dépendait de Médéa, est rattaché à la commune mixte de Berrouaghia.
En 1947 il est promu chef-lieu de CPE
En 1952 une nouvelle mairie est inaugurée le même jour que celle de Loverdo, le 4 novembre, par une pléiade de personnalités politiques et religieuses. Les politiques sont notamment le Président de l'Assemblée (Laquière), le Président du Conseil général (Farès déjà rencontré à Berrouraghia, le Préfet d'Alger (Trémaud) et les maires de treize communes du Titteri ; le maire venu de plus loin étant celui de Letourneux.
Les trois religions monothéistes étaient également représentées.
A peu près 80 européens devaient, à cette date, vivre dans la commune : une douzaine de familles de colons propriétaires, trois gérants, un hôtelier-cafetier et des fonctionnaires.
Le cadre naturel est franchement montagneux, entre 800 et 1000m d'altitude. Le climat y est très favorable à la vigne. Les vins y étaient de qualité supérieure.
Le relief, ainsi qu'on le voit sur le petit extrait de la carte au 1/50 000, est marqué par l'encaissement profond de 300m de l'oued qui se jette au sud dans la vallée de l'oued Sahari, tributaire du Chélif.
Le village a été construit sur un dos de terrain dominant cette vallée. Il a l'aspect d'un village-rue, tout en longueur comme son voisin Ben-Chicao situé à 18 km plus à l'est. Soyons sincère, le village avait deux rues paralléles à la route, avec de belles maisons à étage qui s'expliquent, et par la date tardive de la fondation du centre, et par le mode d'attribution des lots qui avait sélectionné des familles aisées, et par la taille des lots. Cette image est celle d'un village qui paraît prospère. Les arbres y sont nombreux derrière les maisons. La végétation naturelle était forestière.
Un seul service d'autocar reliait une fois par jour, dans chaque sens, le village à la gare dite de Ben-Chicao, mais qui est assez loin du village du même nom. Il n'y avait aucun service direct vers Médéa à 28 km ou vers Berrouaghia à 18 km.
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